Quand la sexualité virtuelle tourne au cauchemar

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On se souvient tous d’Amanda Todd, l’adolescente canadienne qui a mis fin à ses jours en 2012, après avoir subi une longue période de railleries et de violences verbales. Avant sa mise à mort, la jeune fille postait sur youtube une vidéo dans laquelle elle raconte, du début à la fin, le récit de son calvaire.

La jeune fille utilise dès la classe de la 5eme, des « vidéos chats » qui lui permettent de faire des nouvelles rencontres. Comme beaucoup d’adolescent, la jeune fille est naïve et crédule et montre un jour sa poitrine à un inconnu qui va alors utiliser ce prétexte et exercer une pression sur la jeune fille, lui demandant de toujours se dénuder davantage. Perdue et déstabilisée, Amanda s exécute et c’est alors le début du cauchemar, celui d’une jeune fille qui deviendra la risée de son établissement, puis de tous ceux qu’elle enchaînera, par la faute de cet individu qui utilisera ses photos afin de détruire sa vie. Seule et abandonnée de tous, Amanda se pend chez elle le 10 octobre 2012. Une histoire similaire à celle de Jessica Logan, qui avait également mis fin à ses jours en 2008.

Depuis la création de réseaux sociaux et de plateformes facilitant les rencontres et les échanges multimédias, les jeunes sont de plus en plus nombreux à subir des pressions exercées par des inconnus, ou parfois même par des proches. Les témoignages sont nombreux : ex petit ami qui exerce une pression, chantage, vengeance…
En 2010, une étude américaine a montré que 38% des filles et 39% des garçons avaient déjà reçu des photos « sexy » qui étaient, à la base, destinée à quelqu’un d’autre. Ce phénomène d’envois photos dénudés ou sexy, au départ innocent, plus communément appelé « sexting », lorsqu’il tourne au cauchemar, est devenu une des causes fréquentes de suicide chez les jeunes.

Une des plateformes les plus connues d’échanges de photos rapide, « SnapChat » parait au début prometteuse. Le principe : envoyer des photos ou vidéos de soi ou de ses amis à la durée de vision limitée (1 à 10 secondes). Néanmoins les jeunes ont tendance à oublier que ces photos peuvent être enregistrées par le destinataire. Il existe une autre application, SnapHack qui elle permet de sauvegarder les photos sans que l’expéditeur en soit avisé et qui va à l’encontre du principe de Snapchat. Principe discrédité lorsqu’on sait que, de toute façon, le serveur de Snapchat conserve absolument toutes les photos envoyées par ses utilisateurs.

En effet, à l’instant même où la photo est envoyée, rien n’est plus contrôlable. Si des échanges et partages se font, il est quasi impossible de récupérer la photo et la supprimer de tout le web. C’est un phénomène très complexe puisque, du statut de la victime à celui du bourreau, il n’y a qu’un sms.

« Un jour j’ai envoyé une simple vidéo à un garçon, je ne pensais pas que cela allait nuire à ma réputation…[…] Une fois, j’étais chez mon copain lorsqu’il reçoit un message d’une de ses amies avec une photo montage de moi, nue et qui m’insultait. L’image a tourné mais j’ai eu la chance de surmonter cet épisode grâce aux bonnes personnes qui m’entouraient. » témoigne Jennifer, 13 ans.

Les plaintes sont nombreuses, mais la protection juridique est très aléatoire, à cause du consentement de la victime d’être prise en photo au départ. En effet, l’article 226-1 du code pénal – principal recours dans le cas du sexting – n’entre en vigueur qu’à condition que la victime ne soit pas consentante. Cet article prévoit notamment un an d’emprisonnement et 45000 euros d’amende. De ce fait, les malfaiteurs ne sont pas toujours reconnus et le cauchemar peut ainsi durer très longtemps.

Si le phénomène est principalement connu aux états-unis, en France, il gagne du terrain. En effet, la ligne téléphonique « net-enfance-famille », conçue pour répondre aux questions sur les jeunes et l’Internet, témoigne :  » 6 % des appels concernent le sexting. »

La campagne de Pro Juvente s’est chargée de la prévention majeure en France contre le sexting,avec une campagne pour prévenir les risques du sexting, de nombreuses explications, applications et numéro d’urgence (147) et même des forums afin d’aider des jeunes en détresse.

« Le sexting peut te rendre célèbre, même si tu ne le veux pas du tout »

Au Canada, afin de réduire les plaintes et problèmes liés à ce phénomène, la police lance une application :  » Send this instead ».

Il s’agit d’une application où l’on peut trouver 57 réponses ironiques et sarcastiques qui permettent de répondre à ces demandes sexuelles. Sans doute par honte ou par embarras, les jeunes ont tendance à ne pas en parler et se renferment sur eux-mêmes sans prévenir qui que ce soit. « Send this instead » a pour but de rassurer les jeunes : ils ne sont pas seuls et surtout, ne sont pas obligés. De plus, l’application permet aussi de prévenir les autorités afin de stopper les demandes au plus tôt et mettre en confiance les adolescents concernés.

« Non, mais continue à prendre des selfies. Les flics vont adorer tes photos d’identité ».
 » Etre nu? C’est tellement 2008. Je lance une nouvelle mode, j’envoie des photos de moi avec 10 couches de vêtement. »

Actuellement, l’application n’est disponible qu’au Canada, mais à l’issue d’une conférence sur les crimes contre les enfants au Texas qui aura lieu entre le 11 et 14 août, celle-ci sera diffusée partout dans le monde.

Auteur Morgane Billuart